C'est la question posée à la majorité des Français, tiraillés entre la réforme et le refus, dans une période qui cumule les jacqueries féodales, les frondes royales, les grognes napoléoniennes et les légitimes revendications de la « Sociale ». Alors que le travail, qui se transforme, très vite, exigerait qu’on l’organise et le valorise plutôt qu’on le refuse.
Jeunes ou moins jeunes, ceux qui ne vivent que de leur travail, sont bien obligés de répondre à la question avant de la rejeter en cherchant à se mettre à la charge de l’Etat. Ceux qui se sont exprimés dans la précédente lettre, avec leurs formations permanentes et collectives comme ceux qui, dans celle-ci, s’engagent, avec leurs moyens, pour « s’en sortir » montrent qu’ils s’adaptent aux réalités.
Au début de la vie professionnelle, comme dans le renouveau d'une suivante, à chaque fois, le maçon est au pied de son mur. La manière de s'en sortir ne dépend que de lui. Je l’ai appris il y a 75 ans, et à plusieurs reprises par la suite, encore tout récemment.
Tout tient à la volonté personnelle de s’en sortir car rien n’est jamais gagné. Dans la France rurale et coloniale, 1930-1950, c’était la famille qui permettait de s’en sortir, soit en préparant et installant le successeur soit en ne le retenant pas. Dans celle urbanisée et étatisée des années 1960-1970, c‘était l’Etat autoritaire qui nourrissait en assurant la promotion sociale. Dans la France déclinante de 1980-1990 ce fut l’Etat providence, à crédit. Dans la mondialisée de 2000-2010 c’est l’individu qui doit s’en charger.
Les jeunes Français, qu’ils soient au pied de leur mur, ou à mi hauteur commencent à le comprendre dans un pays qui s’attarde dans le passé comme il l’a déjà fait, pour son malheur. Jusqu’à enfermer sa jeunesse, aujourd’hui, dans cette « assignation à résidence » éducative, culturelle, productive et sociologique dénoncée dans le super débat du 15 avril entre deux prises de catch médiatico politique.
Il y a un mois j’ai retrouvé un de mes copains de l’école primaire de 1938 perdu de vue depuis le stade de foot en 1941 – 77 ans, un sacré bail. Nous sommes partis sur la même ligne, avec les mêmes moyens, lui avec des chaines aux pieds. Il a été victime de cet enfermement malgré une courte scolarité remarquable qui lui a permis d’écrire un bel ouvrage à 85 ans. Ouvrier cordonnier avec son père 1942 – 1963, employé EDF 1964 -1984, dans une sous préfecture économiquement ruinée, retraité depuis 34 ans.
Chacun comprendra pourquoi je voudrais tant aider ceux qui veulent « s’en sortir ».